Je vais remettre une petite couche de bleu sur cette chronique en évoquant l’éminemment évènement hivernal qui nous sort depuis 20 ans de notre léthargie d’ursidés pour aller nous réchauffer au son de musiques vibrantes, originales, envoûtantes, joyeuses, incandescentes amoureuses, groovantes etc . Je ne suis pas court, vous voyez, pour évoquer la programmation du Bleu en Hiver de cette année.
Ce festival a 20 ans, comme chantait Léo Ferré quand
« Pour tout bagage on a vingt ans
On a des réserves de printemps »
Et ce printemps, il se pointe pour deux semaines dés mardi prochain !
Et dans les bagages de ces 20 ans, il y a un groupe qui nous vient de l’est où on connaît bien l’hiver et surtout des hivers de guerre pour lutter contre l’envahisseur et pour leur dignité.
Je vous parle de DAKHABRAKHA. En ukrainien cela veut dire donner et prendre.
Crée en 2004 au sein d’une troupe de théâtre d’avant garde de Kiev, ce groupe, constitué de trois femmes et d’un homme, va prendre sa propre route pour apparaître en France en 2013 aux Trans Musicales de Rennes.
Là le choc avec le public et les critiques est énorme. Voilà trois chanteuses et un chanteur multi-instrumentiste, en costume traditionnel de style cosaque, qui se présentent avec en fond de scène la projection des manifestations très violentes qui avaient précédé la Révolution de Maïdan de février 2014 . Gros soulèvement qui se dressait contre la soudaine rupture de leur président de l’époque avec le projet européen pour se rapprocher de la Russie et de l’indéboulonnable Poutine.
DAKHABRAKHA n’est pas un groupe de musique ethnique qu’on pourrait aimer pour son charme slave. C’est un groupe militant, engagé qui n’a pas rompu avec le mouvement théâtral d’où il vient. Les paroles, que vous ne comprendrez pas sauf si l’Ukrainien est votre 1ere ou 2eme langue, parle de révolution et d’identité culturelle à sauver depuis que la Russie a agressé leur pays.
Il joue la chanson Plyve choven (Un bateau navigue), « pour ceux qui défendent notre liberté » et à chacune de leurs représentations et martèlent les slogans « Stop Putin ! » et « No War ! » .
Cette chanson fait partie de leur répertoire de musique traditionnelle que le groupe réinterprète en intégrant du hip hop, de la musique minimaliste et sériel, du blues. Ce qui n’a d’ailleurs pas fait toujours l’unanimité parmi les ukrainiens traditionalistes un peu rassis et conservateurs.
Mais ce n’est pas uniquement une musique qui accompagne un mouvement de lutte contre la disparition de l’Ukraine et un effacement de ses cultures et de sa langue voulu par Poutine . C’est aussi une musique envoûtante et chamanique, qui ne laisse pas vos poils tranquilles tellement la puissance tellurique de leurs voix et des percussions résonne dans votre fondement le plus primitif de votre cerveau et de vos tripes.
Pour DAKHABRAKHA, leur démarche est dédié « à ceux qui ont donné leur vie pour notre liberté, qui continuent de se mettre sur ses gardes et qui adoptent le défi d’une personne libre sans perdre leur espoir»